samedi 28 février 2009

Le poème-relation: une notion critique pour le continu langage-pensée


(Quelques remarques écrites en marge de la lecture du dernier livre d'Henri Meschonnic pour poursuivre la conceptualisation de la notion de "poème-relation". Voir la note de lecture : http://martinritman.blogspot.com/2008/12/un-feu-de-joie-avec-la-langue-de-bois.html)

L’enjeu critique de la notion de poème-relation[1] à conceptualiser dès qu’on lit, écrit, dès qu’un poème vous fait penser, engage l’activité de penser et donc ce qu’on peut appeler vivre. Cet enjeu, c’est celui de l’engagement du point de vue du continu contre les habitudes qui font passer celui du discontinu comme naturel, transparent, didactique voire scientifique. La relecture que Meschonnic[2] propose d’Héraclite à l’occasion des objections qui lui ont été faites par Pierre Sauvanet vient heureusement rappeler combien il faut redoubler d’engagement pour le continu. Et Meschonnic repartant de Marcel Conche[3] pour lequel les fragments héraclitéens « forment système » (p. 13), pose que le système héraclitéen « fait le système éthique du continu » (p. 78) qu’une formule d’Héraclite résume magistralement : « les rapports ne sont pas des êtres » (p. 466). Meschonnic situe l’enjeu d’une « systématicité interne ouverte » comme « réflexivité d’un point de vue », (p. 81), celui du continu dans et par le langage, la relation. Ce qu’explicite le fragment suivant : « le lien qu’on ne voit pas est plus fort que celui qu’on voit » (p. 82). On peut alors parler d’« une activité héraclitéenne » (p. 84), comme fait Meschonnic, pour tenir ensemble « en une seule tension conceptuelle » comme fait Héraclite, « la pensée et le langage » (ibid.). Donc avec la visée du poème-relation, en lecture comme en écriture, il s’agit de tenter de tenir ensemble pensée et langage du point de vue relationnel, où « les rapports ne sont pas des êtres » et où les termes viennent avec la relation et non avant comme des essences réelles. C’est-à-dire, dans les termes de Meschonnic, avec le poème-relation affirmer le point de vue du continu.


[1] S. Martin, Langage et relation. Poétique de l’amour, L’Harmattan, 2005.

[2] H. Meschonnic, Dans le Bois de la langue, Laurence Teper, 2008.

[3] Héraclite, éd. de M. Conche, Fragments, PUF, 1986.

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