lundi 31 août 2009

Confluences poétiques n° 3


Dans cette revue dirigée par le poète Luis Mizón, un beau dossier réalisé par Magda Carneci et Linda Maria Baros présentant des poètes roumains (p. 11 à 245) par ordre chronologique d'année de naissance, de 1940 à 1983. Un petit dossier accompagne cette anthologie: "des artistes plasticiens roumains à Paris"...
Mais je voudrais surtout signaler l'entretien conduit par Luis Mizón avec Henri Meschonnic, qui vient conclure ce fort numéro sorti en décembre 2008 - excusez mon retard de lecture. Henri Meschonnic y précise très clairement sa définition du poème comme acte éthique et il revient sur la genèse au présent de son livre Parole rencontre (L'Atelier du grand tétras, 2008) ainsi que sur ses débuts avec l'hébreu biblique en rappelant d'un revers d'humour: "je n'avais aucun rapport avec la juiverie" quand Mizón lui demande s'il a fait sa bar mitsvah. S'en suit un beau passage où Meschonnic dissocie conceptuellement et donc pragmatiquement pour la lecture et pour l'écriture, pour la traduction aussi, le sacré, le divin et le religieux. Pour en revenir au poème: c'est "le continu entre le langage et la vie, et c'est l'invention, chaque fois, d'une historicité nouvelle". Avec des exemples précis qui montrent la force de l'oralité dans les oeuvres et ici dans la Bible, jusqu'à cette formule: "c'est l'oreille qui voit, surtout chez les prophètes, mais pas seulement chez les prophètes". Et j'aime ce "pas seulement" qui met le prophétisme dans le poème et non dans le théologico-politique... Et Meschonnic le sait, "je suis un marginal complet", mais il y a de quoi faire rougir les savants religieux de toute obédience puisque ce sont des "faibles d'oreille"... et "il y a un oecuménisme de la surdité" (dans les religions, à n'en pas douter mais aussi dans toutes les autres institutions célébrantes: les cercles poétiques, les institutions scolaires et universitaires...). Et il finit, invité par Mizón, sur la conceptualisation de la notion de continu qui seule permet de penser ce que Spinoza appelait la "concatenatio" ou l'interaction. Ce que j'aime appeler la relation dans et par le langage. Un très bel entretien pour continuer "de bouche en bouche" à marcher son infini, multiplier ses vies, recommencer à chaque autre - je paraphrase en remontant le poème (p. 20 dans De monde en monde, Arfuyen, 2009) qui vient clore l'entretien. Merci à Luis Mizón et à Confluences poétiques (5 Square de Port-Royal, 75013 Paris).

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